Aag
Traduction : Le Feu
Langue | Hindi |
Genre | Classique |
Dir. Photo | V. N. Reddy |
Acteurs | Raj Kapoor, Shashi Kapoor, Nargis, Premnath, Kamini Kaushal, Kamal Kapoor |
Dir. Musical | Ram Ganguly |
Paroliers | Majrooh Sultanpuri, Behzad Lucknavi, Deepak, Wazahad Lucknavi |
Chanteurs | Mohammad Rafi, Shamshad Begum, Mukesh, Shailesh |
Producteur | Raj Kapoor |
Durée | 138 mn |
Ce film a été présenté en ouverture de la rétrospective, le mardi 3 février 2004, en présence de Madame l’ambassadrice de l’Inde en France. Une file d’attente s’étendait sur le parvis de Beaubourg, atteignant la rue ! Face à tout ce monde, il nous a été difficile de trouver une place et nous avons bien cru que nous ne verrions pas le film, puisque nous avons été baladés de salle en salle (trois salles de projection). Pour cette première, quoi de plus approprié qu’un film de Raj Kapoor, LE maître du cinéma indien de l’âge d’or, à plus forte raison son premier film…
Kewal (Raj Kapoor lui-même) est un jeune homme rêveur, passionné de théâtre, dont le désir le plus grand est de créer des pièces et de jouer avec Nirmila, son amie d’enfance. Hanté par le souvenir de celle-ci, disparue, il la cherche dans les yeux des femmes avec lesquelles il a une certaine affinité. Il fait part de ses projets fantasmatiques à ses parents, prêt à affronter leur déception. Débarrassé du fardeau de leurs espérances, il peut alors aspirer à réaliser son rêve. Il s’associe avec Rajan, un riche mécène, peintre et amoureux des arts, qui devient son ami. Ensemble, ils redonnent vie à un vieux théâtre. En recherchant l’héroïne d’Aag, leur dernière pièce, ils rencontrent une jeune actrice qui va semer le trouble entre eux, puisque Rajan tombe amoureux d’elle, alors qu’elle
aime Kewal…
Raj Kapoor brûlé au visage
’I’ll never forget Aag because it was the story
of youth consumed by the desire for a brighter and more intense life.
And all
those who flitted like shadows through my own life, giving something, taking
something, were in that film.’
Raj Kapoor
Aag (feu), titre du film, est aussi le titre de la pièce que Kewal essaie de monter. On en suit toute la création depuis l’écriture jusqu’à la première représentation, en passant par le casting où Kewal cherche désespérément l’actrice idéale, « sa » Nirmila, pour jouer le rôle principal. Toute la conception de la pièce, y compris les répétitions, est prétexte à des scènes chantées et dansées, dites « de coulisse », à la manière des comédies musicales hollywoodiennes. Ainsi, on suit en parallèle les à-côtés de cette création, c’est-à-dire la relation en triangle entre Rajan, Kewal et l’actrice principale qu’il a baptisée Nimmi. Peu à peu, le drame se dessine. Nimmi tombe amoureuse de Kewal, tandis que Rajan s’éprend silencieusement d’elle, reconnaissant la mystérieuse femme qu’il peint depuis des années. Obnubilé par sa pièce, Kewal ne se rend compte de rien et lorsque, enfin, il prend conscience de la situation, il est grièvement brûlé au visage par le feu qui enflamme son théâtre.
Aag est une ode à la pureté de l’amour, qui n’est pas une attirance physique, mais une attirance plus profonde, qui touche l’âme. Le feu, symbole de la passion, est omniprésent dans le film, car tel en est précisément le thème : la passion qui enferme dans un monde à part, la passion qui, aveuglante, condamne à suivre un chemin différent de la norme, celle qui enflamme les jeunes esprits et les poussent vers la voie choisie par leur cœur… La passion destructrice enfin, où ce trop plein de désirs inassouvis aboutit à un incendie. Kewal en gardera des séquelles, éternellement marqué par une brûlure
au visage.
Le film est très poétique, tant dans les tirades que dans les chansons. Le noir et blanc n’enlève rien au charme des acteurs. Le jeu de ces derniers rend le film léger et agréable. Kewal et Nirmila enfants sont irrésistibles, on entend des rires dans la salle à chacune de leurs manigances. Raj Kapoor n’apparaît pas beaucoup à l’écran, il interprète en effet le rôle de Kewal adulte, narrateur de sa propre histoire. On retrouve aussi Nargis, son actrice fétiche, qui jouera ensuite dans nombre de ses films. À l’écran,
ils forment un des couples mythiques de Bollywood.
À 23 ans, pour son premier film en tant que réalisateur, Raj Kapoor appuie sa réflexion sur des éléments très variés
qui rendent les aspects autobiographiques incontournables.
La dualité - la beauté physique qui s’oppose à la beauté de l’âme - est une caractéristique qui sera réitérée dans son œuvre sous diverses formes. De même, la question de l’errance, par le personnage de Kewal qui quitte ses parents pour partir à l’aventure, sera présente notamment dans le célébrissime Awaara.
Raj Kapoor innove également dans Aag avec la relation en triangle, typique
de Bollywood.