Aaja Nachle
Traduction : Viens, dansons
Langue | Hindi |
Genre | Comédie dramatique |
Dir. Photo | K. U. Mohanan |
Acteurs | Madhuri Dixit, Akshaye Khanna, Konkona Sen Sharma, Kunal Kapoor, Irrfan Khan, Ranvir Shorey, Divya Dutta, Vinay Pathak |
Dir. Musical | Salim-Suleiman |
Paroliers | Jaideep Sahni, Piyush Mishra |
Chanteurs | Shreya Ghoshal, Kailash Kher, Sunidhi Chauhan, Sukhwinder Singh, Sonu Nigam, Salim Merchant, Rahat Fateh Ali Khan, Madhuri Dixit, Richa Sharma, Marianne D’Cruz, Sonia Saigal |
Producteur | Aditya Chopra |
Durée | 147 mn |
Aaja Nachle marque le retour de Madhuri Dixit, tant espéré par ses fans depuis Devdas en 2002. Le public n’y retrouve sans doute pas le personnage glamour qu’il attendait, mais le film reste néanmoins intéressant et plutôt inattendu.
Diya (Madhuri Dixit), jeune danseuse, s’est sauvée de chez ses parents pour suivre celui qu’elle aimait à New York. Onze ans plus tard, elle revient car son ancien maître de danse se meurt en lui laissant pour mission de redonner vie à Ajanta, le temple de danse de la petite ville de Shamli, dont le site est convoité pour y construire un centre commercial.
Le raja – député local (Akshaye Khanna), la met au défi de faire revivre le site en y créant en deux mois maximum un spectacle interprété par les gens "du coin". Si elle réussit, point de centre commercial. Alors, Diya recrute, entraîne, met en scène le conte classique Laila et Majnu (Roméo et Juliette indiens, d’origine perse). Elle doit se battre contre le scepticisme de la population, le cynisme des politico-businessmen, les petites trahisons et les grands moments de solitude.
Le but de Diya est aussi le meilleur moment du film, alors autant commencer par là. Le spectacle en lui-même, Laila et Majnu, joué dans ce théâtre en plein air, hors d’âge, est splendide. La mise en scène contemporaine, le jeu des acteurs, le rôle de récitant de Madhuri, la musique, la lumière, tout en fait un moment d’exception. Il vaut la peine à lui seul de regarder ce film, même s’il faut attendre les dernières 20’. Et il est suffisamment mis en valeur pour qu’on se sente vraiment spectateur, comme ceux qui sont assis dans les gradins.
On ne serait sans doute pas aussi ému par ce spectacle si on n’avait pas suivi l’histoire des deux apprentis comédiens : Imran (Kunal Kapoor), réfractaire à tout romantisme, qui a eu tant de mal à se mettre dans la peau du rôle de Majnu, et Anokhi (Konkona Sen Sharma), dès le début folle d’Imran, mais qui est très loin d’incarner l’idéal féminin représentée par Laila, et qui devra faire bien des efforts pour y parvenir. Ce sont eux, l’âme véritable d’Aaja Nachle, et ils sont réellement attachants.
Alors, Madhuri Dixit ? Elle est la déesse, celle qui provoque, celle par qui tout se fait et se défait, celle qui rend aux êtres leur vraie dimension. Mais c’est là précisément que le film n’est pas vraiment à la hauteur, comme s’il comptait uniquement sur la présence de l’actrice pour donner la profondeur nécessaire à ce rôle. Le scénario et les dialogues manquent cruellement de subtilité, du coup on a l’impression que Diya tire les ficelles, manipule les hommes comme des marionnettes.
Après ça, il ne faut pas s’étonner si le public (masculin) boude le film…
En plus, Diya apparaît comme un personnage double : dans la vie, une divorcée américanisée jusqu’au bout de ses cheveux mi-longs et colorés, qui décide, organise, négocie froidement. Sur scène, un summum de féminité, aux cheveux sombres longs et bouclés, qui joue ouvertement de sa séduction. Même s’il est classique que les danseuses expriment sur scène plus de séduction qu’elles ne le feraient dans la vie, on a du mal à faire le lien entre ces deux facettes de Diya.
On ne peut rien véritablement reprocher à Madhuri Dixit, qui joue bien quel que soit le registre, c’est plutôt son personnage qui n’est pas très équilibré. Et comme la plupart des seconds rôles sont simplistes, cela n’arrange rien. Divya Dutta, Irfan Khan et Akshaye Khanna sont complètement sous-exploités. Seuls Kunal Kapoor et Konkona Sen Sharma tirent leur épingle du jeu, surtout cette dernière qui incarne à merveille cette Anokhi bourrue du début et dont on suit l’évolution avec plaisir.
La mise en scène d’Anil Mehta (dont c’est le premier film en tant que réalisateur, après une carrière de chef opérateur), rend hommage au spectacle de Laila et Majnu, mais n’exploite pas assez à mon goût la préparation du spectacle, on voit à peine le temps d’une chanson les répétitions, on ne sent ni la tension, ni la ferveur qui devrait animer l’équipe de novices. On se contente de petites scènes mises bout à bout qui nous font patienter plus qu’elles ne servent vraiment le propos (la danse apporte la vie à la ville, la danse est un lien social…). Un peu décevant, donc.
Quant à la partie musicale de Salim Sulaiman, on oubliera aisément Dance with me, la première chanson chorégraphiée "made in New York". On retiendra plutôt Aaja Nachle, une danse donnée en avant-première dans le théâtre, dont la chorégraphie n’est pas exceptionnelle mais qui met en valeur une Madhuri Dixit éblouissante. La musique a tendance à devenir entêtante, méfiez-vous d’une consommation prolongée…Ore Priya et Show me your shalva sont de jolies ballades. Ishk hua est la plus romantique et met en image l’amour naissant entre Imran et Anokhi. Soniye mil ja est la chanson du spectacle Laila Majnu ; la musique, sans être inoubliable, sert bien ce beau passage.
Aaja Nachle est au final un film attachant grâce à cette histoire pourtant secondaire. Le film est desservi par le caractère trop simpliste du scénario de Jaideep Sanhi, mais il permet de passer de bons moments et de retrouver une Madhuri Dixit plus éclatante que jamais.
On peut quand même regretter que Yash Raj Films soit passé à côté de ce qui aurait pu être un grand film.
A noter : à sa sortie le film a fait l’objet d’une polémique autour de la délicate question des castes, car dans la chanson Aaja Nachle les paroles disent que "même les cordonniers se prennent pour des bijoutiers" (en voyant la belle danser), or les cordonniers (mochi) sont assimilés à la caste des intouchables. Les "dalits" ont protesté et dans certains états, le film a été banni des écrans avant d’être amputé du passage incriminé.