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Bombay


Bande originale

Hamma Hamma
Kannalanae
Uyire Uyire
Kuchi Kuchi
Poovukkenna Poottu
Bombay Theme
Malarodu Malaringu
Idhu Annai Bhoomi

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La critique de Fantastikindia

Par Ganesh, Gandhi Tata
Publié le 21 juillet 2005

Note :
(8.5/10)

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Avis de Ganesh :

Avec Bombay, Mani Ratnam est le premier réalisateur indien à oser parler dans un film populaire des émeutes de Bombay de décembre 1992 à janvier 1993. Le film faillit ne pas voir le jour tant les problèmes furent nombreux. Tout d’abord, il eut toutes les peines à obtenir l’aval du CSA indien à cause de la violence et des allusions politiques présentes dans le film. Une fois le test du comité de la censure réussi, ce fut au tour des extrémistes hindous et musulmans de protester violemment contre la sortie du long métrage, le jugeant offensant pour leur communauté. Mani Ratnam échappa même à un attentat dirigé contre lui (une bombe explosant dans sa maison de Madras). Finalement, sous la pression communautaire il effectuera plusieurs coupes dans le film afin qu’il puisse être diffusé à Bombay. C’est donc en plein tapage médiatique que le film sortit en 1995 et triompha dans les salles. Unanimement salué par les critiques et plébiscité par les spectateurs, Bombay deviendra le plus gros succès de Mani Ratnam à ce jour et remportera plusieurs prix nationaux (meilleur film et meilleur réalisateur). Il reste l’un des films marquants de l’histoire de la cinématographie indienne.

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Le round d’observation

L’histoire commence pourtant assez innocemment, Shekar (Arvindswamy), étudiant en journalisme, retourne dans son village au cœur du district de Thirunevelli, au Tamil Nadu. A son arrivée, il aperçoit Bano (Manisha Koirala) et c’est le coup de foudre mutuel (dans les films de Mani Ratnam, les personnages ne perdent pas de temps lol). Mais voilà, il est hindou, elle musulmane, leur amour va se heurter au désaccord des parents. La tension est à son paroxysme entre les deux familles quand Shekar décide de retourner à Bombay où Bano le rejoindra plus tard, coupant ainsi les liens familiaux. Les années passent, le couple file le parfait amour quand l’affaire de la Mosquée Babri Masjid à Ayodhya éclate…

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Nos héros chantent leur amour réciproque

La première partie du film est traitée dans la pure tradition du cinéma indien populaire, on y retrouve la trame d’un gros bon mélodrame : un couple d’amoureux d’origines différentes, des patriarches opposés à cet amour, une petite dose d’humour, beaucoup de larmes et enfin la séparation avec la famille. Quatre des cinq numéros musicaux parsèment la première partie et donnent le ton au film, en abordant chacun un thème différent où la joie et la passion vont crescendo : La rencontre (Kannalane), Le chant de l’Amour (Uyire : nos deux héros chantent leur amour l’un pour l’autre), La « First Night » (Amma) , La Naissance (Ruptera Mastana). Rien de nouveau sous les tropiques donc (enfin si : la religion) mais l’ensemble est parfaitement maîtrisé, bien interprété, la mise en scène et les chansons sont excellentes, de jolies photos nous font découvrir Thirunevelli, bref cette première partie est très distrayante et on attend la suite avec impatience - la réconciliation avec les parents - quand Mani Ratnam nous balance l’Horreur en pleine figure.

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Tension !

En effet, avec la deuxième partie, on quitte l’univers du mélo pour frôler le film documentaire sur l’un des événements douloureux de l’histoire de la jeune république indienne. Rappel historique : le 6 décembre 1992, des milliers de fondamentalistes hindous détruisirent la mosquée abandonnée de Babri Masjid, érigée par les moghols au 15ème siècle, sous prétexte qu’elle se trouvait à l’emplacement présumé du lieu de naissance de Rama. La destruction fut suivie de violentes émeutes entre hindous et musulmans un peu partout dans le pays, dont les plus graves se déroulèrent à Bombay. Ce sont ces violences interreligieuses qu’aborde la deuxième partie du film. Beaucoup de sujets sont traités sans complaisance par Mani Ratnam : l’intolérance, l’impuissance des forces de police, la corruption, la réaction tardive du gouvernement, la responsabilité des chefs religieux, et l’on sent que le réalisateur a envie de bouleverser les consciences des spectateurs indiens avec Bombay. Pari réussi, tout en évitant le voyeurisme, le cinéaste parvient à montrer toute l’atrocité des massacres avec à la fois force et pudeur.
Mani Ratnam touche ici à une forme de grâce indescriptible, qui passe autant par les images (travail admirable de Rajiv Menon notamment pour les scènes d’émeute), les dialogues, que par la musique composée par AR Rahman. Celui-ci nous délivre l’une de ses plus belles compositions, des chants d’une puissance émotive extraordinaire (Chitra sur Kannalane est époustouflante). Le thème principal qui a fait le tour du monde, ne vous sera pas inconnu, c’est la fameuse musique de la pub de Zinédine Zidane pour une célèbre marque d’eau minérale.

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La fuite vers Bombay

Bombay doit aussi beaucoup à ses acteurs, à commencer par Manisha Koirala qui trouve là l’un de ses meilleurs rôles (qui lui a valu le titre de la meilleure actrice au National Award) et Arvindsamy , ils incarnent avec beaucoup de subtilité et de retenue ces héros des temps modernes confrontés à la barbarie et à l’intolérance de leurs compatriotes. A noter les performances brillantes des pères joués par Nasser et Tinnu Anand. Remarque : Nasser, musulman de confession, joue le père hindou et vice versa pour Tinnu Anand.

Bombay est un témoignage bouleversant sur cet épisode noir de l’histoire indienne. Un film dur mais qui a le mérite de rappeler à chacun que l’intolérance est un fléau à combattre. Espérons que le message plein d’humanité adressé par Mani Ratnam à son peuple, sera compris par le plus grand nombre. Ce joyau de la cinématographie tamoule est à découvrir.

Note : 8/10

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Bonheur de courté durée

Avis de Gandhi Tata

Sortie en 1995, Bombay est une œuvre à part dans la riche filmographie de Mani Ratnam, deuxième volet de sa trilogie consacré au terrorisme, ouvert par l’inoubliable Roja et clôturé avec le très controversé Dil Se. Bombay est une pièce importante, pour ne pas dire centrale, de son réquisitoire contre la violence, car elle traite de la genèse de cette haine destructrice, l’origine de la douleur qui mène à la terreur : les conflits religieux.

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Jusqu’où peut nous mener la haine ?

Le casting s’avère être une des qualités essentielles de chaque production de Mani Ratnam et cela se vérifie une fois de plus, le couple Arvind Samy-Manisha Koirala est convaincant, tant en jeunes amoureux qu’en parents responsables ;ils ont su apporter cette maturité à l’évolution de leurs personnages, à noter une très belle scène où Shaila Bano annonce sa maternité à Shekar, dans un premier temps en détresse à l’annonce de cette paternité imprévue et ensuite rassuré par sa femme : « nos dieux veilleront sur nos enfants », une phrase pleine d’espoir et de sens, comme pour annoncer l’arrivée de ces jumeaux, symboles de réconciliation et de paix entre hindous et musulmans.

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Un peu de douceur dans ce monde de brutes

L’espérance d’une fraternité est incarnée par les beaux-pères : Kabhir Narayan et Kamal Bashir. Ils se haïssent à l’annonce de la relation entre leurs enfants, mais se serrent les coudes lors des violentes émeutes à Bombay. Sans prendre partie, sans discours stigmatisant à l’encontre des entités religieuses, Mani Ratnam condamne la ferveur meurtrière.

La musique d’A.R.Rahman est variée, entre hits dansants « Umma », « Kuchi kuchi rakaama » et ballades romantico-mélancoliques : « Kannalané », « Uyire », le mozart de Chennai se réinvente à chaque collaboration avec son mentor Mani. A l’écoute de cette bande originale, on sent son engagement envers une cause qui lui tient à cœur (à savoir qu’A.R.Rahman, hindou de naissance, s’est converti au soufisme musulman), chaque note de sa composition finale : « Ithu annaiy bhoomi » résonne comme le cri des victimes du massacre d’Ayodhya, l’énergie de sa partition musicale est au service de l’espoir, celui d’un rapprochement entre frères réunis autour d’un même drapeau : le vert symbole de l’Islam, l’orange celui de l’hindouisme et ces deux couleurs de l’Inde réconciliées par le blanc de la paix.

note : 9/10

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