Om Shanti Om
Langue | Hindi |
Genres | Comédie romantique, Masala |
Dir. Photo | V. Manikandan |
Acteurs | Shah Rukh Khan, Arjun Rampal, Shreyas Talpade, Dia Mirza, Deepika Padukone, Satish Shah, Kiron Kher, Bindu |
Dir. Musical | Vishal-Shekar |
Parolier | Javed Akhtar |
Chanteurs | Shreya Ghoshal, Sunidhi Chauhan, KK, Udit Narayan, Sukhwinder Singh, Sonu Nigam, Shaan, Rahat Fateh Ali Khan, Richa Sharma, Nisha Mascarenhas, Abhijeet Bhattacharya, Caralisa Monteiro, Marianne D’Cruz, Rahul Saxena |
Producteur | Gauri Khan |
Durée | 170 mn |
Plus bollywoodien que jamais, Om Shanti Om réussit la gageure d’être à la fois un must et son pastiche, un hommage et une satire, une véritable belle histoire de réincarnation dans la plus pure tradition et un divertissement très innovant. Avec en pièce maîtresse un Shah Rukh Khan déchaîné qui ne s’était pas autant amusé depuis des années et qui nous offre une version jubilatoire du ’star system’, des années 70 à nos jours.
Alors, l’histoire : Dans les années 70, Om Prakash Makhija (Shah Rukh Khan) est un "junior artist", c’est à dire un figurant. Il court les castings avec son copain Pappu (Shreyas Talpade) et discute chaque jour avec son rêve : Shanti (Deepika Padukone), la merveilleuse star dont le visage orne d’immenses panneaux publicitaires. Au passage il croise Rishi Kapoor, Dharmendra et autres héros populaires. Ses espoirs fleurissent… pour finir réduits en cendre par l’ignoble producteur Mukesh Mehra (Arjun Rampal).
Trente ans plus tard, Om Kapoor, star et fils de star, fait des drôles de rêves et finit par reconnaître qu’il est la réincarnation d’Om Prakash. Porteur d’une double mémoire et d’une injustice insupportable, il va tout mettre en œuvre pour confondre l’odieux Mukesh. Et ce "tout", c’est son univers, le cinéma…
Farah Khan la réalisatrice, nous offre du cinéma qui se fait son cinéma, une mise en abîme du film dans le film : l’histoire du tournage d’un film non abouti repris 30 ans plus tard, le figurant amoureux de l’étoile, réincarné en star Pygmalion de la débutante, la création d’une fiction plus vraie que la réalité, les emprunts au film Karz (1980)… Tous les miroirs y sont. Toutes les alouettes aussi.
Il fallait oser. Oser les années 70 et leur côté délicieusement rétro mais aussi diablement ringard, avec leurs héros imputrescibles aux codes caricaturaux, leurs scénarios aussi grandiloquents que leur façon de jouer. Mais on sent aussi que Farah Khan surfe sur une magie éternelle, sur cette tendresse sans égal que les Indiens (et autres fans de Bollywood) vouent à leurs vétérans du film, sur la sincérité sociale et sentimentale qui fondait le cinéma de cette époque et qui nous touche toujours. Alors, même si on s’amuse beaucoup dans cette première partie, elle sait aussi nous émouvoir et nous attacher à l’histoire. Et puis quel régal de retrouver au détour de chaque scène, les clins d’œil aux films du passé et à leurs stars. Gestuelle, costumes, reconstitutions, décors, scénographie, tout y est.
La seconde partie, qui se déroule de nos jours, continue à jouer sur ces registres : l’auto dérision du star system, la mise en abîme, le jeu de miroirs. Avec de vraies scènes comiques, dont la parodie des Filmfare Awards reste un must (après ça on pardonne à Abhishek Bachchan tous les Dhoom venus et à venir…).
Shah Rukh Khan se parodie lui-même et franchement, il n’a jamais été aussi irrésistible. Jusqu’aux fameux "six packs" (abdos façonnés à la Hritikh Roshan) qui ont dérouté ses fans mais qui, au final, ne sont eux aussi qu’un pied de nez au star system -même s’ils ont servi d’appâts marketing bien réels.
Cette deuxième partie est la plus attachante, parce qu’on est dans l’intrigue pour de bon. Comme Om, on veut confondre le méchant, venger l’innocente Shanti. On est content qu’il retrouve sa maman et son copain, on fond devant les gaucheries de la débutante, on apprécie que le héros ne tombe pas bêtement amoureux du sosie de Shanti mais poursuive son but (merci aux scénaristes).
Peu à peu, le jeu du Shah se fait plus nuancé, plus émouvant : son personnage arrête de jouer la star pour s’attacher à sa mission et devient enfin lui-même en incarnant un autre (subtil, non ?!). Du début à la fin du film, Shah Rukh Khan est vraiment dans le rôle. Etant producteur du film (Red Chillies Entertainment), je craignais qu’il ait visiblement "la tête ailleurs", comme dans Paheli. Bien au contraire, on retrouve l’acteur au mieux de sa forme, avec un charisme décuplé et une énergie qui crève l’écran.
Deuxième film de Farah Khan, Om Shanti Om est un coup de maître. Autant j’étais restée dubitative devant Main Hoon Na, reconnaissant le boisseau de références aux cinémas tous genres confondus, mais sans ressentir la moindre émotion, autant là j’ai non seulement "marché", j’ai couru. Ecoutant la musique en boucle, j’attends avec impatience la sortie du DVD pour le re-regarder encore et encore. Om Shanti Om risque bien de devenir le premier film culte des fans de Bollywood depuis Kabhi Khushi Khabie Gham et Devdas, il y a 5 ans déjà. Et Farah Khan pourrait bien devenir la grande prêtresse de Bollywood, car elle manie à merveille les codes et leur magie, quand Sanjay L. Bhansali, Karan Johar et Aditya Chopra semblent en avoir perdu l’usage en devenant ’adultes’. Om Shanti Om, même s’il est souvent au deuxième degré, a gardé cette espèce de merveilleuse candeur héritée de l’âge d’or de Bollywood.
La musique et les clips de Om Shanti Om font largement partie de cette magie, tout en étant curieusement un monde à part. A part Daastaan E Om Shanti Om, pendant laquelle se déroule une scène clé, les clips ne sont pas franchement "intégrés de façon naturelle à l’histoire", comme on aime le dire des films qui nous ont plu. Au contraire, ils forment – comme dans les classiques de Bollywood- une rupture poétique, onirique, des bulles, on retrouve d’ailleurs un bel hommage à Raj Kapoor et ses décors de rêve (Awaara).
Chaque chanson est une respiration, certaines n’ont aucun lien avec l’histoire principale, à la façon de Ishk Kamina dans Shakti - the power, ou Kajra Re dans Bunty aur Babli. Sans Aishwarya Rai, mais avec 31 stars pour Deewangi Deewangi, record inégalé. Et avec une morphologie de SRK dans Dard E Disco ouvertement transformée pour faire fantasmer ses fans.
Farah Khan est non seulement Master es-Bollywood, mais aussi Master es-Business… Toute la promotion du film a été fondée sur ces clips, qui annonçait des surprises, et une vraie différence avec le "tout-venant" de l’industrie Bollywood, tout en ne racontant rien ou presque sur le scénario du film qui, lui, demande à entrer dans l’histoire pour être apprécié.
Les chorégraphies de ces chansons sont un peu décevantes, notamment celle de Daastaan E Om Shanti Om, qui aurait mérité une mise en scène plus percutante et moins "’encombrée", mais la musique reste une des meilleures BO de ces dernières années. Les compositeurs Vishal et Shehkar se sont surpassés, proposant une partition étonnante, avec des chœurs, des violons, des intonations innovantes, un véritable "OVNI" dans le paysage musical, toutes tendances confondues. Voir l’article de Jawad.
Il peut aussi saluer les performances d’Arjun Rampal : il ne surjoue jamais, il est crédible toutes périodes confondues, d’un regard il nous cloue sur place et on en redemande. Ses face-à-face avec Shah Rukh Khan sont un régal. Kirron Kher parodie joyeusement les mères tragédiennes ’made in Bollywood’. Quant à la jolie Deepeka Padukone, franchement elle assure. Elle irradie la grâce en star sûre d’elle-même, elle est craquante en débutante même si le chewing-gum est un peu surexploité, et son regard sait devenir troublant. Sans oublier le vieux copain d’OM, incarné par Shreyas Talpade (vu dans Dor), dont on se ferait bien un copain aussi.
Des premières images jusqu’au générique de fin qui met en scène toutes les personnes qui ont pris part au film, Om Shanti Om est donc un film unique, réjouissant, à ne manquer sous aucun prétexte.