Sivaji - The Boss
Publié mardi 13 mai 2008
Dernière modification dimanche 7 novembre 2010
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Sivaji marque le retour de AR Rahman aux côtés du réalisateur Shankar, après une "infidélité" sur Anniyan où il avait confié la musique à Harris Jeyaraj. Mais c’est surtout le grand retour du trio magique Shankar-AR Rahman-Rajinikant qui avait déjà fait des merveilles avec Padayappa et Muthu.
Pour la musique de Sivaji, Shankar a renoué avec A.R. Rahman pour une B.O. éclectique. Visiblement pas convaincu des productions de Rahman au cours de l’année 2005 (à raison lorsqu’on écoute son travail très décevant sur Mangal Pandey), Shankar avait choisi de s’entourer d’un autre producteur, Harris Jeyaraj, sur Anniyan. Mais Rahman a rehaussé son niveau depuis quelque temps, en proposant des BO telles que Rang De Basanti ou Guru, et Shankar l’a bien senti en lui confiant la réalisation musicale de Sivaji. Celui que l’on surnomme le "Mozart" indien a su saisir l’opportunité en proposant un album intéressant.
Dès la première écoute, une chose saute aux oreilles. C’est diversifié ! L’identification des titres se fait très rapidement, puisque chacun a une signature, que ce soit la ballade romantique langoureuse (Sahana), le titre bourrin traditionnel (Ballelaka) ou même l’ovni destructuré (Style).
La chanson d’introduction Ballelaka est un titre folklorique avec des percussions traditionnelles tout droit venu du monde rural, de quoi accrocher les masses. Des variations rythmiques et mélodiques permettent d’éviter un titre uniforme, et l’interprétation énergique de S.P.B. retient l’attention.
S’ensuit une composition riche et complexe avec un mélange de voix et de rythme pour Vaaji… Vaaji…, Hariharan est fidèle à lui-même tout en retenue et en puissance mêlées, mais c’est bien la chanteuse Madhushree qui retient l’attention avec sa diction sensuelle et mielleuse. Son grain de voix permet à la chanson de décoller, et les chœurs tout droits issus d’une cathédrale amplifient cette impression d’apesanteur qui se dégage de cette composition. On pourra regretter un manque de variations au niveau du rythme, mais ne boudons pas notre plaisir, puisque cette uniformité a le mérite de ne pas nous sortir de ce cocon musical. La production est ici aussi grandiose que les décors qui accompagnent la mise en image de cette ballade.
On a beaucoup critiqué par le passé la prononciation désastreuse d’Udit Narayan, mais à présent ses détracteurs peuvent ravaler leur paroles, car sur Sahana, il s’est considérablement amélioré et c’est un plaisir d’entendre une voix qui se fait rare ; Chinmayi l’accompagne de manière admirable, sa modulation de voix et le jeu qu’elle impose à ses cordes vocales est tout simplement hallucinant. A.R. Rahman se charge des intermèdes vocaux ensorcelants, ajoutez-y la flûte, l’orchestration et toute l’atmosphère créée par l’excellent travail de placement des chœurs et des instruments, superbe ! Sans doute le titre le plus beau de l’album.
Cette chanson est d’ailleurs reprise en thème de fond avec les superbes voix de Vijay Yesudas et Gumathee, avec une simple guitare pour battre la mesure. Là encore le travail d’ambiance exercé grâce aux flûtes, aux nappes de synthétiseur et aux voix des choristes, nous plonge dans du satin.
Véritable ovni musical, le titre Style fait figure d’épouvantail dans cette collection maîtrisée de chansons assez haut de gamme. Délire orchestré par Shankar ou par Rahman lui-même ? En tout cas, cette exubérance et cette originalité se retrouvent dans le clip qui accompagne Style. Mais originalité ne rime pas toujours avec qualité. Et si le temps d’un clip on peut s’amuser en écoutant cette chanson totalement déstructurée, il n’en est pas de même lorsqu’on tente des écoutes répétées sur sa platine de salon. Il y a de la vivacité dans les interventions du chanteur, ou dans les interventions remarquées des chœurs, mais aucune mélodie. Du rythme syncopé, et encore du rythme syncopé. On aurait pu attendre mieux dans le même genre.
Enfin, le dernier titre, Athiradee, est une BOMBE. Pour la première fois A.R. Rahman prête sa voix à Rajni sur un tempo endiablé et une guitare qui swingue, et le résultat rend particulièrement bien à l’écran, à l’occasion d’un clip délirant.
Au final, on peut dire que l’album de Sivaji à l’image du film est un produit à la conception irréprochable et à la finition soignée. Le but était de toucher le plus grand nombre et c’est mission réussie. Rahman a pensé à tout le monde : des fans de Rajni (Ballelaka) à ses propres fans (Vaaji, Athirade), en passant par les amateurs de mélodies (Sahana) et de titres expérimentaux (Style). De plus, la plupart des titres n’est pas périssable (mis à part Style) comparé à Anniyan, qui fut une compilation de hits éphémères. Sivaji vient s’ajouter à la longue liste de succès du duo Shankar-Rahman, le compositeur est tout aussi prolifique qu’avec son mentor Mani Ratnam. On espère à présent que leur collaboration sera aussi fructueuse pour leur prochain opus : Endhiran.