Uthama Puthiran
Traduction : Le fils vertueux
Langue | Tamoul |
Genres | Classique, Film historique |
Dir. Photo | A. Vincent |
Acteurs | Sivaji Ganesan, Padmini, Nambiar |
Dir. Musical | G. Ramanathan |
Paroliers | A.Maruthakasi, T.K. Sundaravathiyar, KS. Gopalakrishnan , Balasubramaniam |
Chanteurs | T. M. Sounderarajan, P. Suseela, A. P. Komala, K. Jamuna Rani, Jikki, P. Leela, R. Balasaraswathi Devi, Seerkazhi Govindarajan |
Producteurs | C. V. Sridhar, S. Krishnamoorthy, T. Govindarajan |
Durée | 157 mn |
Dans les années 50-60 le masala n’était pas encore le genre le plus populaire du cinéma tamoul, du moins pas sous la forme ‘film d’action’ qu’on lui connaît maintenant. A cette époque, si il y avait une bonne proportion de drames sociaux, les films de cape et d’épée étaient les plus appréciés. Ceux-ci s’inspiraient des films hollywoodiens (Errol Flynn, les 3 mousquetaires), reprenaient souvent la trame de certains classiques de la Shaw Brothers, et ressemblaient aussi beaucoup aux films français (ceux de Hunebelle, ceux avec Jean Marais, etc…) en y mélangeant allègrement toutes les influences les plus improbables, du bharatanatyam traditionnel jusqu’au twist, en passant par le jazz.
Outhama Puthiran est une adaptation de « L’homme au masque de fer » d’Alexandre Dumas, remis dans le contexte d’un royaume tamoul.
La reine de la cité royale de Malarpuri est enceinte, ce qui ne fait pas les affaire de son frère Naganathan (Nambiar), qui convoite le trône. Il s’arrange pour subtiliser le bébé et le faire tuer. Cependant le soldat a qui il confie la tâche a des états d’âme et se contente d’abandonner le nourrisson dans un lointain village. L’affaire se complique quand un autre bébé apparaît : ce sont des jumeaux. Naganathan propose alors de faire son éducation, et en fait son pantin. Devenu premier ministre il dirige de fait le royaume par l’intermédiaire du prince Vikraman (Sivaji) qui grandit comme un enfant gâté et irresponsable. Son frère Parthiban (Sivaji) élevé par des fermiers est au contraire un honnête et courageux combattant. Il tombe amoureux de la princesse Amuthavalli (Padmini) qui est la fille du premier ministre, et un jour en se rendant secrètement au château il est prit pour le Prince…
C’est donc un film de cape et d’épée dans la plus pure tradition du genre, spectaculaire, romantique, et divertissant au possible. Sivaji s’en donne à cœur joie dans un double rôle. Il est odieux en Vikraman, et adorable en héros parfait quand il incarne Parthiban. La différence entre les deux est bien rendue, par une diction et une démarche différente. Certaines scènes sont très fortes, comme celles de la confrontation et de l’affrontement entre les deux frères, ou le combat final avec toute la garde, tourné dans de très grands décors. Il est visiblement très à l’aise dans les combats à l’escrime, et n’hésite pas à exécuter certaines cascades improbables. Padmini est excellente dans son rôle de princesse. Le film lui donne l’occasion de montrer sa maîtrise de la danse dans certaines chansons, Kathirupan Kamalakannan étant sûrement un des classiques incontournables en la matière.
La musique est l’autre point fort du film : les chansons n’arrêtent pas la narration, elles l’accompagnent. La première, illustre le temps qui passe et montre la croissance des deux frères dans deux directions opposées. La célèbre Yaaradi Ni Mohini, un mélange de twist et de musique indienne, permet de montrer le personnage de Vikraman sous son côté homme à femmes : il y multiplie les partenaires, avec un regard de braise et un sourire acéré. Les autres chansons sont principalement de belles mélodies, qui bénéficient de jolies paroles poétiques comme on savait en faire à l’époque (Mullaimalar Mele, Anbe Amudhe..).
La musique, comme l’esthétique du film, ont ce charme rétro des films en noir et blanc, pourtant pour un film de cette époque Outhama Puthiran est une réussite étonnante. La première partie est assez lente, pour permettre d’installer l’intrigue et de présenter les personnages. Mais dès que les deux frères se rencontrent tout s’accélère et la narration gagne en rythme, multiplie les retournements de situations, si bien qu’on ne s’ennuie pas. Les chansons ne viennent pas encombrer l’histoire, c’est même étonnant car la plupart des vieux films en comptent au moins 7 ou 8, mais ici elle sont moins nombreuses et suffisamment espacées pour qu’on puisse les apprécier. La réalisation est vraiment moderne, en tout cas dans l’esprit, avec un souci permanent de rythme qui est vraiment surprenant pour un film de 1958.
Dans l’ensemble le film est donc vraiment soigné. C’est particulièrement frappant dans les scènes de confrontation des deux frères, et pas seulement pour le jeu d’acteur impeccable de Sivaji Ganesan. Les trucs techniques utilisés sont bien connus : écran coupé en deux, cache noir… mais ils sont vraiment bien fait et on ne les voit pas, contrairement à certains films fait d’aujourd’hui où on voit la ligne verticale qui sépare l’écran.
Il est probable que la pellicule noir et blanc donne plus de facilités aux trucages de ce genre, après tout des films comme Nosferatu ou le King Kong originel ont mieux vieillis que certains classiques des années 60. En tout les cas le réalisateur T.Prakash Rao avait acquis une excellente maîtrise technique, et a su faire d’Outhama Puthiran un très bon divertissement !
Il s’agit d’un des films les plus connus de l’époque, encore très apprécié aujourd’hui. Pour preuve, il a fait l’objet d’un remake en 2006. La comédie historique Imsai Arasan 23am Pulikesi en reprenait toute la trame narrative, mais sous forme parodique, et rencontra un grand succès populaire.