Goodness Gracious Me, satire télévisée de la société indienne
Publié mardi 19 septembre 2017
Dernière modification mercredi 23 août 2017
Article lu 483 fois
Par
◀ | Sanam |
▶ | Kaviya Ilango, illustratrice engagée |
Goodness Gracious Me est une série télévisée britannique, en 18 épisodes de 25 minutes et deux épisodes de 50 minutes, créée par Nitin Sawhney et Sanjeev Bhaskar ; et diffusée entre 1998 et 2001 sur la BBC. En France, la série a été diffusée sur Comédie sous le nom de Delhi Royal.
La chanson interprétée par Peter Sellers et Sophia Loren pour la promotion du film Les Dessous de la millionnaire (« The Millionaires », 1960) a beaucoup inspiré le titre original de la série. Dans ce film, Peter Sellers non seulement se grimait en médecin indien, mais le thème musical provenait aussi d’un arrangement avec un morceau de bhangra.
Les années 80-90 de la BBC ont été créatives. De nouveaux concepts ont fait leur apparition — comme Desmond’s ou The Real McCoy. Cependant, il manquait un programme novateur 100% british pour satisfaire la diaspora indienne ou, plus globalement, la société immigrante issue de l’Asie du Sud-Est (Pakistan, Bangladesh). Ainsi, au lieu de s’attaquer aux différences ethniques, religieuses et/ou culturelles, les créateurs de la série ont choisi, en condensant leur approche multicommunautaire, une cible : La société anglo-indienne.
Les créateurs et acteurs principaux sont les suivants : Sanjeev Bhaskar, Kulvinder Ghir, Meera Syal et Nina Wadia. Leur concept de base est l’exploration des conflits d’intégration entre la culture indienne et les mœurs britanniques modernes. Certains sketchs se proposent même de formuler un point de vue indien (particulièrement piquant) concernant l’identité britannique. D’ailleurs les principales caricatures sont inspirées de membres de leurs familles, de leurs amis ou de célébrités. Sanjeev Basjkar dit même dans une interview que c’est une manière cathartique de lutter contre le racisme, car les agressions verbales étaient nombreuses à l’époque (« Pakis », « Terroriste »), notamment après les attentats du 11 septembre 2001 [1].
La série a remporté le prix du Best Entertainment, par le Broadcasting Press Guild Award, ainsi que le Team Award par la Royal Television Society en 1999. En 2014, un épisode spécial est diffusé par la BBC pour célébrer les quinze ans de la chaîne BBC Two (et l’opération sera réitérée en 2015).
La série repose sur les stéréotypes et archétypes de/sur la société indienne. Deux des plus connus sont la maman indienne qui se vante de pouvoir faire les mêmes plats à la maison sans devoir à aller au restaurant (« I can make it at home for nothing, all I need is a small aubergine » // « Je peux faire la même chose à la maison, il me faut juste une petite aubergine ») ; et le vieil oncle qui explique à son neveu que « Everything comes from India » (« Tout vient de l’Inde »).
La série a quelques peu fâché la communauté indienne, notamment les personnes âgées dénonçant une stigmatisation de leurs origines ainsi qu’une utilisation des stéréotypes à outrance.
Parodies et références
J’ai découvert cette série en 2003 par le biais d’un ami, qui avait rapporté le coffret DVD d’Angleterre. C’est une série que j’affectionne particulièrement et que je recommande, car je n’ai jamais trouvé d’équivalent par la suite. À mon sens, elle est révolutionnaire comme l’étaient Les Inconnus en France. Comme le disent les créateurs, ils voulaient rappeler par ces pastiches qu’ils étaient avant tout Anglais.
Je la trouve brillante dans le fait d’avoir trouvé des personnages extrêmement bien définis, qu’on ne peut qu’adorer. C’est un plaisir de les retrouver, au fil des épisodes, dans un style burlesque teinté de parodies.
Il est important de savoir que des générations entières d’immigrants ont pu se rapporter à cette série afin de partager avec leurs parents des codes sociaux-culturels et un mode de vie « importé ».
Même si j’appartiens à la région du Tamil Nadu, c’est toujours avec beaucoup d’humour que je découvre cette satire et la critique de nos us et coutumes, (comme cette famille qui tente d’élever une vache dans l’appartement). La raison de leur succès passe, selon moi, par cette écriture cartoonesque en format court, créant ainsi une sympathie pour les personnages brillamment interprétés aux caractéristiques finement définies, provoquant l’hilarité à chaque fois que je visionne un épisode. D’ailleurs le fait d’évoquer cette série avec vous, me donne envie de visionner de nouveau Goodness Gracious Me, afin de renouer avec ces protagonistes que j’affectionne tant. Bien sûr, elle mérite d’être « dévorée » en version sous-titrée. Le coffret peut se trouver pour le prix de 30 euros sur Amazon UK.
[1] Par ailleurs, le vocabulaire argotique punjabi et hindi est distillé dans les dialogues, en respectant le langage familier des britanniques d’origine asiatique.