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Goopi Gawaiyaa Bagha Bajaiyaa

Traduction : Le Monde de Goopi et Bagha

LangueHindi
GenreFilm d’animation
ActeursAditya Sharma, Rajeev Raj, Manish Bawan, Shailendra Pande, Shahanawaz Pradhan
Dir. MusicalNarayan Parshuram, Three Brothers and a violin
ParolierRohit Gahlowt
ChanteursHamsika Iyer, Mukthiyar Ali, Mani Iyer, Vishwajeet Borwankar, Jayteerth Mewundi
ProducteursSoumitra Ranade, Shravan Kumar
Durée78 mn

Bande originale

Goopi Gawaiyaa Theme
Salam Salam
I Am the Belt ; You Are the Pyjama
Salam Salam (reprise)

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Fiche IMDB
Page Wikipedia
La critique de Fantastikindia

Par Alineji - le 1er mai 2015

Note :
(9/10)

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Cendrillon n’est pas la seule héroïne à posséder des pantoufles extraordinaires. Dans la littérature enfantine indienne, Goopi et Bagha ont aussi les leurs. Mais n’allons pas trop vite.

Goopi (voix de Manish Bhawan) est chanteur. Hélas son enthousiasme est beaucoup plus grand que son talent. Dès le matin, il donne de la voix et éveille les habitants de son village qui n’en peuvent plus et finissent par le prier fermement d’aller offrir son talent au monde, autrement dit d’aller chanter ailleurs. Arrivé de nuit dans une forêt, il rencontre Bagha (voix de Rajeev Raj), percussionniste joueur de pakhawaj, chassé lui aussi de chez lui et pour les mêmes raisons. Les deux nouveaux amis n’en mènent pas large dans ce lieu peuplé de fantômes, bientôt ravis par leur musique. Le Roi Fantôme, qui entame une danse autour d’eux, décide de satisfaire trois de leurs vœux : leur musique sera appréciée par tous les auditeurs, il leur suffira de taper dans leurs mains pour avoir de la nourriture en abondance et enfin, grâce à des pantoufles magiques, ils pourront se transporter en un clin d’œil partout où ils le souhaitent.

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Les pantoufles magiques

Nos deux compères, un peu balourds, se rendent ensuite dans le royaume de Shundi, où le pacifique souverain les accueille à bras ouverts et où ils peuvent vérifier que leur premier vœu a bien été exaucé. Mais, le roi Lakshmipati apprend que le roi de Hundi, son frère Padmapati, veut attaquer son royaume. Goopi et Bagha proposent alors de l’aider à conserver la paix et le roi leur promet en retour la main de sa fille, la princesse Monimala… Vont-ils réussir ? Comment ? Une seule princesse pour deux amis ? Il fallait un certain culot à Shilpa Ranade pour oser s’attaquer à cette histoire que connaissent tous les petits indiens, après le magistral et poétique long-métrage du réalisateur de la Trilogie d’Apu.

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Une vraie princesse de Bollywood

En effet, Les Aventures de Goopi et Bagha, c’est d’abord le conte de l’écrivain, graveur, poète et musicien bengali, Upendra Kishore Ray Chowdhury, publié dans la revue pour enfants Sandesh et illustré par ses propres dessins. Devenu un classique, il fut porté à l’écran en 1969 par son petit-fils, Satyajit Ray. En choisissant l’animation, la réalisatrice échappe à des rapprochements faciles avec le film initial et réussit le pari de faire œuvre originale tout en restant fidèle au récit d’origine. Elle en conserve la trame et les moments forts, la danse du Roi Fantôme par exemple, morceau de bravoure du film de Satyajit Ray. Bien plus courte ici, moins surréaliste, elle n’en conserve pas moins une grande force poétique.

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La danse du Roi Fantôme

Goopi Gawaiyaa Bagha Bajaiyaa est le premier long-métrage de Shilpa Ranade qui enseigne l’animation à l’IDC (Industrial Design Centre), de l’Institut Indien de Technologie de Bombay, dont elle fut l’élève. Avant cela, elle a été l’auteur de plusieurs courts-métrages d’animation et a surtout publié nombre de livres illustrés pour enfants. Tournant délibérément le dos à la 3D et aux procédés d’animation digitaux, son film utilise les techniques classiques de personnages animés sur un fond fixe. Réalisée avec un petit budget et par une petite équipe d’environ vingt personnes, l’œuvre compense avantageusement le manque de moyens, grâce notamment à un graphisme virtuose, une exubérance des décors, tous plus somptueux les uns que les autres, souvent peints à l’aquarelle, et des matières qui semblent venir de tissus brodés et donnent l’illusion du relief.

Si l’on devait rapprocher le travail de Shilpa Ranade d’un autre cinéma d’animation, on évoquerait tout de suite l’animation tchèque des années 1950. Elle n’est pas si éloignée d’un Jiri T ?nka, venu comme elle de l’illustration pour enfants – on pense particulièrement à son adaptation du Songe d’une Nuit d’été en 1959 —, ou de certains films de Ján Švankmajer un peu plus tardifs, par exemple son court-métrage Et Caetera, pour la richesse des textures en particulier. Coupée de l’Occident, l’école tchèque avait dû puiser dans son folklore, la cinéaste choisit d’emprunter pour sa part à toutes les sources de la culture indienne, des grandes épopées à l’art tribal, en passant par Bollywood. Le résultat est brillant. Son Roi Fantôme paraît surgir d’une miniature hindoue du Ramayana ou du théâtre d’ombres indonésien.

Le spectateur est saisi dès le début par la grande qualité plastique des images. Ce dessin animé est d’une splendeur visuelle qui ne se dément pas jusqu’à la fin. Les personnages ne sont pas beaux, ils ne correspondent à aucun standard esthétique, sinon à celui de la fantaisie de l’auteur. Filiformes ou au contraire ronds comme des billes, hérissés d’arêtes, etc., tous sont travaillés avec soin et les plus insignifiants personnages sont différenciés. Les enfants ou adultes indiens n’auront aucun mal à retrouver les références de la réalisatrice. Les deux musiciens, Goopi et Bagha, avec leurs petits bras maigrichons, ont sans doute pour ancêtres quelques marionnettes populaires (cf. celles de l’arbre aux fantômes de Paheli). Les animaux sont tout aussi bien traités : le coq du début, déstabilisé par le chant de Goopi, est un pur régal, les éléphants ou les deux ânes qui emportent les musiciens, de la poésie pure que l’on retrouve dans certaines peintures murales.

La culture populaire indienne est omniprésente, on l’a dit. La princesse Monimala paraît pour sa part arriver d’une grosse production de Bollywood. La musique des jeunes compositeurs de 3 Brothers and a violin s’apparente également à celle des meilleurs films des studios de Bombay, aussi colorée et variée que les images qu’elle accompagne. Ils ont su piocher aux diverses traditions musicales, du Nord au Sud de l’Inde, pour illustrer presque chaque scène d’un morceau (huit en tout) nouveau et étonnant. On a une préférence pour Salam Salam, repris deux fois avec des paroles différentes et savoureuses dues à la plume alerte de Rowhat Gaulowt. Le thème du duo Goopi et Bagha, à qui, il faut le signaler, plusieurs chanteurs prêtent leur voix selon la chanson, est lui aussi assez irrésistible. La bande son n’est donc pas du tout étrangère au plaisir que l’on prend au film.

À la lecture des lignes qui précèdent, énonçant les nombreuses qualités de Goopi Gawaiyaa Bagha Bajaiyaa, certains craindront peut-être un pur exercice de style. Ils auraient tort, ce long-métrage est d’une grande fraîcheur qui enchantera petits et grands. Enfin, un film d’animation indien, à la fois drôle, touchant et poétique, qui se démarque complètement de l’esthétique Disney ou de celles des mangas. Présenté dans plusieurs festivals internationaux, notamment celui d’Extravagant India, il y a séduit le public à chaque projection. On espère que cette œuvre originale, produite par le CFSI (Children’s Film Society India), pourra être vue sur les écrans hexagonaux et qui sait peut-être plus tard en DVD. Elle le mérite tout autant que Arjun, autre produit récent du jeune cinéma d’animation en Inde.

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