Interview de Mme Murielle Beck
Publié samedi 30 avril 2011
Dernière modification vendredi 29 avril 2011
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Avant la projection du film Raam, nous avons pu rencontrer et interviewer pour vous, Mme Murielle Beck, fondatrice des Tréteaux de feu et Mahé services, mais surtout, initiatrice du cycle Bienvenue à Kollywood, dont c’est la 3ème édition.
Comment est née cette initiative de vouloir projeter des films tamouls ?
Elle est née en fait, de mes voyages successifs en Inde et des rapprochements que j’ai pu avoir avec les professionnels du cinéma indien. C’est quelque chose qui s’est fait tout seul, par mes rencontres et ma frustration. C’est-à-dire qu’à chaque fois que je revenais de mes voyages en Inde, je cherchais des projections de films indiens et tamouls à Paris… Je n’en trouvais jamais. J’ai commencé à m’intéresser au quartier indien, et je me suis rendu compte qu’on n’y vendait que des DVD tamouls et qu’il n’y avait pas de salles de cinéma qui étaient destinées aux projections de films tamouls. Je me suis dit qu’on allait essayer de changer ça et projeter des films tamouls en France, étant donné qu’il y a un public tamoul et que ça peut éventuellement aussi intéresser des Français.
Comment s’est concrétisé ce projet ? Quels sont les acteurs, côté indien et coté français, ayant contribué à la mise en place de ce cycle ?
Comment s’est monté ce réseau composé d’acteurs, de réalisateurs et de personnalités du cinéma tamoul ? Pouvez-vous nous citer quelques noms ?
Alors je ne vais pas vous citer de noms ! Mais je vais vous citer un certain type de cinéma et vous allez tout de suite comprendre qui est derrière ! Donc mon réseau est essentiellement, celui du cinéma réaliste tamoul. Je vais en Inde à peu près tous les trois mois et à chaque fois je vais revoir mes amis. Mes amis sont acteurs, réalisateurs, distributeurs et producteurs. Donc, un ami acteur va me présenter à un ami réalisateur et je vais aller sur un tournage, on va discuter, ensuite, le réalisateur va me mettre en lien avec un distributeur ou son producteur et c’est comme ça que le réseau se crée au fur et à mesure. Et à chaque fois que je retourne en Inde, je rencontre de nouvelles personnes, de nouvelles têtes et c’est toujours charmant.
Quel a été votre tout premier contact avec le cinéma tamoul ?
Ameer a fait trois films, le quatrième devrait sortir cette année, pourquoi le choix s’est-il porté sur Raam ?
Parce qu’il y a une part de violence dans les films tamouls qui est indéniable et que certains films tamouls seraient trop violents pour être projetés en France. Raam est un de ceux qui sont le moins violent. Dans Paruthi Veeran, il y a quand même des scènes qui sont très lourdes émotionnellement, donc je me suis dit que Raam serait celui qui passerait le mieux.
On voit que votre préférence va vers le cinéma réaliste, mais il y a aussi un certain cinéma à mi-chemin entre masala et réaliste, comme celui de Gautham Menon, est-ce que ce cinéma vous intéresse ?
Non pas vraiment, je n’aime pas le mélange, car je trouve toujours qu’on y perd quelque chose. Je préfère les films qui sont bien positionnés et à la limite, je préfère aller voir un film complètement commercial en étant avertie, ça peut être aussi du bon cinéma. Ce n’est pas parce que c’est commercial, qu’il faut le rejeter automatiquement ; ou à côté de ça, je préfère aller voir un film estampillé art et essai, mais je n’aime pas ce qui est masala et ce qui est mélange des genres.
En trois éditions, vous avez réussi à faire venir les acteurs, Vincent Asokan pour Sila nerangalil en 2008 et Jeeva en 2010, pour Raam. Comment êtes-vous parvenue à établir ce lien de confiance avec ces artistes et les attirer sur votre projet, étant donné leur inaccessibilité et leur désintérêt pour le public français ?
Je pense que la confiance, c’est le point fondamental et crucial. Ils me sentent sincère et sont intrigués par cette jeune Française qui traverse une partie du monde, pour venir leur demander s’ils veulent bien venir à un événementiel qu’elle organise sur un de leurs films. Je ne crois pas qu’ils soient désintéressés par le public français, ils sont d’abord dans leurs préoccupations, c’est-à-dire qu’ils sont dans leur monde. On sait qu’en Inde, tout va très vite, on fait tout à la dernière minute, ils se concentrent essentiellement sur leur public, leur art et leur travail. Cependant, ils regardent beaucoup de films européens et américains, mais ça ne veut pas dire qu’ils ne sont pas intéressés par ce public-là, simplement que pour eux, c’est un public qui est encore trop lointain.
On ne leur a jamais donné l’occasion d’aller rencontrer ce public-là, or, peut-être que le fait que je leur propose moi, ça les intrigue et leur donne envie de découvrir ce qui se passe ailleurs. Ils veulent avoir le retour du public sur leur façon de jouer. Jeeva a été très attentif à ça, il était très ému de voir que les gens pouvaient apprécier sa façon de jouer, alors qu’il avait l’impression de jouer à la tamoule. Je lui ai dit "non, tu es simplement un acteur et tu fais ton travail d’acteur", et le simple fait que les gens puissent lui dire "vous êtes un très très bon acteur ! bravo, félicitations !", c’est une belle reconnaissance pour lui et il était le plus heureux du monde.
Gandhi Tata : Ça fait plaisir, parce qu’on ne sait jamais ce que pensent les professionnels du cinéma indien sur le public français, et de l’intérêt qui existe ici.
Je rajouterais encore quelque chose ! C’est que je l’ai choisi aussi, c’est-à-dire que je ne vais jamais aller vers quelqu’un qui serait susceptible d’avoir la grosse tête. Étant donné que mon réseau est assez large, je vais toujours rester auprès de personnes modestes qui font leur travail et sont prêtes à rencontrer d’autres gens.
Quelles sont les choses à améliorer pour que le cinéma tamoul s’exporte mieux en France ?
Bienvenue à Kollywood est né de votre initiative, mais comment avez-vous convaincu les autres membres des Tréteaux de feu de vous suivre dans cette aventure ?
Je crois qu’ils sont curieux, ce sont des gens ouverts et il ne faut pas oublier qu’ils sont artistes. J’ai beaucoup de chance de les avoir et il y a une véritable amitié autour de cette structure, autour d’eux. Mon dynamisme les a sûrement encouragés à me suivre, mais ce sont avant tout des créatifs, donc l’ouverture est là.
C’est dans cette optique-là que Mahé services a vu le jour ?
C’est pour donner plus d’assise au travail qui est fait sur Kollywood et les projections. Je crois que j’ai maintenant envie que ça devienne quelque chose de plus officiel et reconnu. C’est aussi la volonté d’avoir une structure dédiée au cinéma tamoul, c’est-à-dire que par ce biais, on va exclusivement s’occuper de la projection de films tamouls. Le théâtre, ça sera autre chose car notre compagnie, constituée de professionnels et d’amateurs, travaille sur pleins de choses, le son et le théâtre, le cinéma en fait partie aussi. Mais notre fonds de commerce, c’est le théâtre et le spectacle vivant.
L’un des éléments importants pour rendre un film indien accessible au public français, c’est le sous-titrage. Mais de nombreux films indiens n’ont pas bénéficié de sous-titres de qualité. Comment ce processus de sous-titrage s’est fait pour Raam ?
Parlez-nous du projet franco-tamoul d’Ameer Sultan.