Raanjhanaa
Traduction : L'Aimée
Langue | Hindi |
Genre | Mélodrame / Romance |
Dir. Photo | Natarajan Subramaniam, Vishal Sinha |
Acteurs | Dhanush, Abhay Deol, Sonam Kapoor |
Dir. Musical | A. R. Rahman |
Parolier | Irshad Kamil |
Chanteurs | Shreya Ghoshal, Keerthi Sagathia, Sukhwinder Singh, Rabbi Shergill, Javed Ali, Vaishali Samant, A. R. Rahman, Shiraz Uppal, Jaswinder Singh, Anwesha Datta Gupta, Meenal Jain, K.M.M.C. Sufi Ensemble, Madhushree, Chinmayee, Aanchal Sethi, Karthik, Pooja Vaidyanath |
Producteur | Krishika Lulla |
Durée | 140 mn |
Raanjhanaa marque les débuts de Dhanush dans le cinéma Hindi. Star confirmée du cinéma tamoul depuis près de 10 ans, le trentenaire met son expérience au profit d’une histoire romantique vraiment pas comme les autres.
Kundan (Dhanush) est le fils modeste d’un prêtre hindou à Vanarasi (ou Bénarès). Il tombe amoureux dès son plus jeune âge de la fille de bonne famille musulmane Zoya (Sonam Kapoor). Cet amour à sens unique perdurera dans le cœur de Kundan durant les huit ans d’une séparation forcée. Mais de retour à Bénarès au terme de ses études, Zoya a de tout autres projets…
Ce qui débute comme la plus classique des histoires romantiques va prendre une tournure totalement inattendue, qui déroutera plus d’une fois un spectateur balloté tout au long des 2h20 du voyage d’une émotion forte à une autre.
Deux ans après le succès surprise de la comédie romantique Tanu Weds Manu, Anand L. Rai à choisi de confier le rôle principal de Raanjhanaa à Dhanush, et celui de Zoya à la fille d’Anil Kapoor, Sonam Kapoor. Et ces rôles pourtant initialement destinés à Shahid Kapoor et Sonakshi Seena semblent au final taillés sur mesure pour les deux acteurs tant leur performance est le point d’éclat du film. Le scénario est issu de la plume d’Himanshu Sharma, déjà auteur de Tanu Weds Manu, qui fait référence à l’amour obsessionnel de Ranja dans le classique Heer-Ranjha puisque Raanjhanaa est une variante d’appellation de l’amoureux transi.
Présenté comme un flashback, le film nous plonge tout d’abord dans les rues grouillantes de vie de Bénarès et nous invite à suivre une romance naissante entre deux enfants, puis deux jeunes gens. On ne peut qu’être qu’enthousiastes devant cette histoire tendre et rafraîchissante dans laquelle Vanarasi est un personnage à part entière, haut en couleur. Pour cela remercions Natarajan Subramaniam, directeur de la photographie qui nous en met plein la vue dans les nombreuses scènes d’extérieur, sans jamais en faire trop. On n’oubliera pas ainsi de citer certains clips visuellement splendides, notamment ceux de Raanjhanaa (durant la fête de holi) ou Banarasiya qui peuvent être considérés comme de nouvelles références en la matière. Mais cet esthétisme n’est pas de l’angélisme et les rues de Bénarès comptent leur lot d’enfants des rues et d’immondices. Le réalisateur accorde en effet une importance toute particulière à l’aspect social comme on le verra par la suite.
Cette entrée en matière de Dhanush à Bollywood est l’occasion pour l’acteur de nous faire toute la démonstration de sa versatilité : tour à tour amoureux transi, amusant et touchant, puis comme la tournure des événements du film, sombrant devenant dramatique, désespéré et au bord du gouffre. Performance d’autant plus notable que les personnages tamouls dans le cinéma hindi sont trop souvent des faire valoir ou des caricatures. Sonam trouve, quant à elle, pour la première fois un rôle révélant son potentiel, dans lequel apparence et interprétation revêtent un naturel qu’on ne lui connaissait pas. Mais ces deux héros ne sont pas seuls et parmi les nombreuses surprises insoupçonnées du film, on notera le présence remarquée de Abhay Deol.
La partie musicale à quant à elle était confiée a A.R. Rahman, et même les moins adeptes du maestro tamoul seront conquis par une bande originale en parfaite symbiose avec l’histoire, totalement au service du film, qui ne cherche pas à briller mais enchaîne pourtant les morceaux (traditionnels pour la plupart) dont la mélodie habitera le cœur des spectateurs longtemps après la fin de la séance. Cet album prend toute sa dimension après avoir vu l’œuvre, l’écoute seule ne permettait pas d’en apprécier toute la qualité.
La première partie de Raanjhanaa est placée sous le signe de la comédie et de la romance, emplie de rires et de danse, de légèreté, de couleurs et d’odeurs. Après l’entracte l’atmosphère change totalement et on entre dans une partie politique qui pourra dérouter certains et faire regretter l’insouciance et la désinvolture du début. Cependant il ne s’agit que du catalyseur dramatique qui nous conduit vers un final d’une grande intensité totalement inattendu.
L’intrigue a priori romantique diffère totalement des romances bollywoodiennes classiques. Tout d’abord chaque personnage porte avec lui sa part d’ombre que l’on découvre petit à petit au cours du film, bien souvent à l’occasion de twists tout aussi imprévisibles que dramatiques. Ensuite l’aspect social est particulièrement développé, une caractéristique que l’on retrouve plus volontiers dans le cinéma hindi de la fin des années 70 ou dans le cinéma du sud. À ce titre, Raanjhanaa rappellera Alaipayuthey par son aspect romance sociale ou encore Kaadhal pour le néo-réalisme de son histoire d’amour.
Par ailleurs, le film attache une importance particulière a l’atmosphère et à l’immersion du spectateur. Pour y parvenir le réalisateur s’appuie notamment sur le soin des détails et la cohérence de la description de la ville, de ses habitants et de leur vie quotidienne (à l’image de la plongée dans Dehli que constituait Delhi-6). Mais le gros de l’immersion est dû à la profondeur des personnages secondaires, le fidèle Murari et l’éprise éternellement éconduite Bindiya, qu’on aura l’impression de côtoyer depuis de nombreuses années au terme de la projection.
On notera que la version doublée en tamoul, Ambikapathy, sortira une semaine après la version hindi dans le sud du pays. La notoriété de Dhanush et de la musique, mais aussi le démarrage encourageant de la version hindi assurant un bel avenir au film ont motivé les producteurs pour augmenter le nombre de copies.
On ressort de la salle bouleversés, chavirés et malmenés par une histoire profonde et touchante sans concession qui ne cède jamais aux sirènes de Bollywood. Des personnages forts dont on aurait aimé partager plus longtemps les aventures, et des interprétations à la hauteur avec notamment un Dhanush époustouflant. Le tout magnifié par une musique et une cinématographie totalement dédiés à la mise en valeur de l’histoire. Et même si la partie politique pourra en rebuter certains, ne boudons pas notre plaisir et saluons Raanjhanaa qui confirme le renouveau tant attendu de la romance hindi.