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Airlift

Traduction : Pont aérien

Bande originale

Soch Na Sake
Dil Cheez Tujhe Dedi
Mera Nachan Nu
Tu Bhoola Jise

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La critique de Fantastikindia

Par Marine - le 26 janvier 2016

Note :
(8.5/10)

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Nous sommes le 24 janvier, la séance de 16h00 d’Airlift au Gaumont Saint-Denis va commencer. Nous avons bien fait de réserver nos places car la salle est pleine. La lumière s’éteint, Airlift va commencer.

Ranjit Katyal (Akshay Kumar) est un roi des affaires dans l’émirat prospère du Koweït, en 1990. Poignarder des amis dans le dos pour faire du profit ne lui fait pas froid aux yeux. Business is business. D’origine indienne, il est Koweïtien jusque dans la musique qu’il écoute, au grand désespoir de sa femme Amrita (Nimrat Kaur). Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Jusqu’au 2 août, à 3h00 du matin, où on lui passe un coup de fil. L’armée irakienne est au Koweït. Simple incursion à la frontière ?
Seulement, plus aucun de ses contacts au gouvernement koweïtien ne lui répond. Ils ont fui dans la nuit. Peu à peu la situation se fait plus claire : les soldats sont dans la ville et ont pris le palais. Si les Indiens ne sont pas la cible directe de cette attaque, ils sont près de 170 000 et il va bien falloir en faire quelque chose.

Le réalisme du film est saisissant, d’autant plus lorsque l’on connait le budget limité qui a été alloué au film. Une partie a été filmée en février 2015 aux Émirats Arabes Unis, et plusieurs scènes l’ont été en Inde – au Rajasthan notamment. Mais le décor mis à part, il y a aussi l’ambiance qui est extrêmement bien rendue. La situation bascule du jour au lendemain et laisse les personnages désœuvrés. Le changement brutal laisse le spectateur au fond de son siège, le ventre noué devant ces adolescents exaltés par la puissance que leur donne leurs armes et les exactions que l’on imagine se dérouler hors champ.

Pourtant, Airlift n’est pas un thriller haletant, un film d’action échevelé ou une course contre la montre. Il prend le temps et il le montre : les vols n’ayant commencé « que » le 13 août, soit plus de 10 jours après le début du conflit. En effet, si la victoire de la coalition contre l’Irak est rapide, l’opération militaire ne commence que plusieurs mois après l’invasion du 2 août 1990. Le film insiste sur la lenteur du gouvernement indien, la volonté des élus de ne pas se mouiller et le rôle déterminant de certains « petits fonctionnaires » et d’Indiens installés au Koweït, ces derniers étant représentés par le héros. Airlift passe sous silence la visite du ministre indien des affaires étrangère à Bagdad, pour obtenir un accord afin de faire sortir les Indiens du Koweït. Néanmoins, lorsqu’à la sortie de la séance, un des spectateurs qui a vécu ces événements de l’intérieur en étant « exfiltré » alors qu’il avait 26 ans, donne son avis sur le film, ce qui ressort, c’est bien le réalisme de la restitution, notamment sur les conditions de vie dans le « camp ».

Parlons très rapidement de la musique, une scène dansée au tout début est là pour montrer la vie heureuse et très « arabe » du héros, puis ce sont des chansons qui accompagnent les personnages et illustrent principalement leurs sentiments. En réalité, on retiendra surtout le Ek Do Teen de Madhuri Dixit, enregistré sur une cassette audio dans la voiture de Ranjit, que l’on entendra à deux moments très différents, fort bien placés, et illustrera le changement d’ambiance.

Akshay a misé beaucoup sur ce film qu’il a en partie produit et il a renoncé à un salaire en échange des droits de distribution. Habitué aux rôles presque schizophrènes où il est, par exemple, le grand benêt qui devient un homme avec un grand « H » (Namastey London, Humko Deewana Kar Gaye, Welcome), le voilà à incarner cet homme égoïste qui finit par prendre en charge tout un peuple abandonné à lui-même. Et sans en faire des tonnes, sans se transformer en super ninja ou en Chulbul Pandey, ça prend. Akshay Kumar est un caméléon qui continue à enchaîner des rôles de plus en plus divers (Brothers, Gabbar is Back) et c’est une très bonne chose pour sa carrière. On lui pardonne même un Singh is Bliing par an. En tout cas, Airlift est sans aucun doute l’un de ses meilleurs films de ces dernières années [1]. À côté de lui, Nimrat Kaur est discrète mais sans être non plus une plante verte comme on en a à la pelle dans les massalas en tout genre. L’ensemble du casting se tient très bien et présente plusieurs personnages avec de petites intrigues qui n’empiètent pas trop sur l’histoire principale et nous attachent à cette foule difficile à visualiser (on parle quand même de 170 000 personnes). Cependant, la surprise vient d’Inaamulhaq (Filmistaan). En effet, lorsque Bollywood met en scène des « méchants » de nationalité étrangère, ils sont rarement bien écrits et transpirent la caricature. Le major irakien est ici parfaitement ambigü et met aussi mal à l’aise le héros que le spectateur dans son fauteuil.

Airlift fut pour moi une vraie claque en pleine figure. Le spectateur sait bien que c’est une histoire (vraie) qui s’est déroulée en 1990, soit il y a plus de 25 ans. En plus du petit rappel sur les événements ayant entraîné l’invasion du Koweït, les appareils électroniques, les silhouettes géantes en carton de Saddam Hussein, et les voitures, ne laissent aucun doute sur le sujet. Seulement, la terreur, la violence suggérée (je précise qu’aucune scène n’est insupportable au spectateur sensible), et le décor pourraient faire penser qu’il s’est égaré et qu’au lieu d’être tranquillement dans une salle de cinéma à regarder une fiction, il a allumé une chaîne d’info.
Pour moi, Airlift renvoie autant à la Guerre du Golfe qu’au désastre humanitaire qui a actuellement lieu aux portes de l’Europe. Et alors que le générique de fin présente les personnages réels ayant inspiré le héros – personnage fictif, lui –, sur fond de photos d’archives, je suis ressortie de ce film pleine de questions et désorientée.
Par exemple, les personnages le disent : avant le conflit, ils étaient tous Koweïtiens. Le jour où être Koweïtien n’est plus bénéfique, ils sont Indiens (et tant pis pour les Koweïtiens). Je laisse la réflexion en suspens. L’objectif d’Airlift est écrit blanc sur noir dans le trailer : " pour le jour de la République [indienne], soyez fier d’être indiens ". On pourrait craindre un message nationaliste nauséabond. Il n’en est rien. Ici, le summum de l’émotion, c’est la montée du drapeau indien, indiquant que les NRI peuvent rentrer à la maison. Applaudissements dans la salle.

Les critiques indiennes sont dithyrambiques depuis la sortie du film. Et (pour une fois), elles ont raison. Airlift retrace un exploit matériel, politique et administratif ayant vraiment eu lieu : faire évacuer près de 170 000 personnes d’une zone de guerre. On ne quitte pas l’écran du regard, on rit, on a les larmes aux yeux et on s’interroge. Le film est bien fait et les acteurs sont bons. Finalement, 2016 ne commence pas si mal. Si vous n’êtes pas encore allés le voir en salle, dépêchez-vous.

La bande-annonce


[1Et je ne le dis pas seulement parce que j’ai regardé le film en compagnie de l’une de ses plus grandes fans.

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