Darr
Traduction : Peur
Langue | Hindi |
Genre | Drame |
Dir. Photo | Manmohan Singh |
Acteurs | Shah Rukh Khan, Anupam Kher, Sunny Deol, Juhi Chawla |
Dir. Musical | Shiv-Hari |
Parolier | Anand Bakshi |
Chanteurs | Lata Mangeshkar, Udit Narayan, Alka Yagnik, Vinod Rathod, Sudesh Bhonsle, Kavita Krishnamurthy, Abhijeet Bhattacharya, Hariharan, Pamela Chopra |
Producteur | Yash Chopra |
Durée | 178 mn |
Kiran Awasti (Juhi Chawla) est fiancée à Sunil Malhotra (Sunny Deol), un officier de la marine qui l’aime de tout son cœur. Tout semble se passer pour le mieux pour le jeune couple jusqu’à l’arrivée de l’étrange Rahul Mehra (Shah Rukh Khan), qui aime Kiran à la folie…
Un mois seulement après Baazigar, Shah Rukh Khan revient dans un rôle négatif, et c’est un nouveau succès. Inspiré, selon le réalisateur, par le thriller australien Calme Blanc, Darr promet beaucoup : une méga-star en devenir dans un rôle atypique, opposée à la superstar du film d’action patriotique, Sunny Deol. Le film commence en douceur par l’histoire d’amour du couple-vedette, nous présentant l’héroïne lisant une lettre de son fiancé resté en mer. L’élégance de la mise en scène du maître de la romance Yash Chopra est déjà décelable, et pourtant une voix off nous annonce solennellement dès le prégénérique que la partition amoureuse que l’on va nous jouer ne sera pas comme les autres, car elle sera marquée du sceau de la peur (darr). Cette intéressante mise en bouche laisse espérer un thriller sur l’amour fou, et on observe avec intérêt l’introduction du couple d’amoureux, auquel on compte s’attacher un peu avant que le méchant ne vienne tourmenter cette idylle.
Mais un premier problème apparaît rapidement : alors que le macho man Sunny Deol surprend par son relatif naturel, l’actrice principale Juhi Chawla, personnage-pivot du film car enjeu autour duquel les deux stars masculines vont s’affronter, est tout à fait insignifiante, laissant le spectateur de marbre. Et si on ne s’attache pas à l’héroïne, la passion amoureuse que lui vouent les deux hommes ne nous touchera pas ! Rien que pour cela, Darr est raté en tant que strict film de genre, à savoir une histoire d’amour fou censée bouleverser le spectateur.
Une autre frustration pour le même malheureux spectateur vient du fait que l’obsession de Shah Rukh nous soit imposée dès le début comme telle, de manière superficielle et arbitraire, puisqu’elle n’évoluera pas d’un pouce pendant toute la durée du film. On espérait plus de finesse chez un auteur confirmé comme Yash Chopra, qui en avait fait preuve dans ses anciens classiques comme Deewaar. Mais il ignore toute psychologie dans Darr, préférant se replier sur une vision idéalisée et simpliste de l’amour, sincère certes, mais qui ne suffit pas à donner vie aux stéréotypes amoureux qu’il nous présente… D’autant plus que l’alternance de cabotinage et de jeu affecté de Shah Rukh Khan, typique de ses débuts, ne plaira qu’à ses fans, bien que son charisme naissant nous évite l’ennui dans les scènes où il est présent, ce qui ne vaut même pas pour Juhi Chawla.
Pour ne pas arranger les choses, les scènes d’action (plusieurs courses-poursuites à pied), sont assez banales ; seules les deux confrontations entre Shah Rukh et Sunny, dans les vingt dernières minutes du film, sont distrayantes ; mais la maladroite empoignade finale sur le bateau qui rappelle, en beaucoup moins bien, celle des Nerfs À Vif de Scorsese, est indigne du talent du réalisateur. Un film plus récent comme Aetbaar avec Amitabh Bachchan, un petit thriller au scénario proche, est par exemple nettement plus réussi.
Chopra tournera ses deux films suivants avec Shah Rukh Khan, le guère plus convaincant Dil To Pagal Hai et le chef-d’œuvre Veer-Zaara ; cependant, on ne peut pas dire que le vieux maître sache diriger son acteur, bien que ce dernier soit le principal intérêt du film, tellement il est involontairement drôle dans le rôle. Qualité ou défaut de la technique de Chopra, le film accuse son âge, ce qui lui donne un petit charme rétro sans qu’il paraisse trop vieillot. Certes, le final tragique laisse tout de même une bonne impression, celle que l’idéaliste Yash Chopra est resté l’éternel romantique de Bollywood… Et pourtant, on ne peut cacher sa déception devant la vacuité de ce film moyen, pas mauvais mais fade, qui ne fonctionne pas vraiment.
Je suis d’accord sur la "mauvaise foi " de Sunny Deol mais outre le charisme de Shah Rukh Khan, c’est son sens dramatique qui fait que son rôle est celui qui a le plus de consistance plus que celui qui quand il a accepté le rôle a seulement pensé "je suis le gentil, le héros aux gros muscles, le commando qui sauve sa belle dans la scène finale" sans réaliser que ce n’est pas cela que l’on peut voir dans ce film .
J’ai lu que c’est son fils qui a imposé Shah Rukh pour ce rôle à son père et cette explication permet de comprendre comment ce rôle est devenu le rôle principal contre toute attente ; tout simplement parce le comédien ne joue pas d’une manière traditionnelle mais en humanisant ses personnages qu’il comprend comme des personnages dramatiques , narratifs.
Il est normal que l’obsession pathologique se tourne vers une jeune fille "commune" et non "glamour" et contrairement à la critique , je trouve Juhi très bien choisie : elle est triviale , commune à souhait , tout comme son fiancé, qui maintient un bon moment qu’il est apte à la protéger.Face à eux , c’est une folie, une pathologie que leur "normalité" a peu de moyen d’appréhender .Shah Rukh est d’une grande justesse pour bien des raisons dans ce rôle introverti : lisse en présence d’autrui, sage comme une image et exalté dans son monde intérieur mais complètement extérieur aussi à la réalité.Une fixation et une sublimation qui est très bien rendue avec les projections dans sa chambre, mais aussi temporellement par la rencontre avec son confident de collège : parce que la sublimation pathologique ne peut marcher que si elle existe dans la durée.Les pulsions mortifères aussi sont très bien rendues grâce à la scène sur le balcon mais aussi par l’ambiguité sexuelle de son personnage vis à vis de Sunny Deol.Réprimant ses pulsions sexuelles , il les retourne contre lui-même et les autres mais il avoue une attirance pour celui qui ne les réprime pas et les vit concrètement .Il s’agit bien d’une psychose que les autres ne perçoivent pas et la cohabitation en Suisse avec le couple le rend bien.L’apparition du coup en commando devient presque ridicule ainsi que le cliché de la demande de mise à mort par la belle , car les coups reçus par le jeune homme à la fin ne sont pas "gratuits" et entraînent non pas la sympathie mais l’empathie du public non pas à cause de la durée, mais parce qu’en entendant cette voix, il revient à la réalité en l’espace d’un regard et cesse de se battre.Et cet amour pathologique montre le désespoir d’une vie , d’un jeune homme dans une solitude totale : ce n’est pas une revanche comme dans Baazigar ni un psychopathe comme dans Anjam .Même si cette mort semble inévitable , personne ne peut la désirer.Et les deux autres ne semblent pas victorieux mais particulièrement indifférents et "stupides" de normalité.