Item-girls : 2005 à nos jours
Publié vendredi 4 décembre 2015
Dernière modification vendredi 4 décembre 2015
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Les trois Khan (Aamir Khan, Salman Khan et Shah Rukh Khan) sont toujours en tête d’affiche. Leurs films attirent les spectateurs comme des aimants la limaille de fer. Les sorties sont devenues rituelles : Shah Rukh à la fête de l’indépendance (le 15 août), Salman pour Dilwali et Aamir à noël. Ils représentent à eux-seul environ 30% des recettes de l’ensemble du cinéma hindi. Qu’un seul de leurs films n’ait pas le succès attendu et c’est un accident industriel.
Leur extraordinaire longévité au sommet empêche les nouveaux venus d’accéder au firmament. Seul Ranbir Kapoor semble en mesure de pouvoir leur tenir tête. La situation des femmes est sensiblement différente car il leur est très difficile de tenir les premiers rôles passés 30 ans. C’est ainsi que Madhuri Dixit ou Karisma Kapoor se sont retirées de la scène. Preeti Zinta, Kajol et Rani Mukherjee comptent avec angoisse les années qui passent. À l’inverse, un bataillon de jeunes beautés acquiert les faveurs du public. Kareena Kapoor, Vidya Balan, Deepika Padukone, Anushka Sharma ou Katrina Kaif sont les noms qui comptent.
Les dernières années voient aussi le retour en grâce des item-numbers. Les actrices de premier plan ne rechignent pas à faire l’item-girl l’espace de quelques minutes. Katrina Kaif nous donnera ainsi Chikni Chameli dans Agneepath et Kareena Kapoor Fevicol Se dans Dabangg 2. Toutes les starlettes de Rakhi Sawant à Sunny Leone s’y mettent aussi. Elles sont tellement nombreuses et les item-numbers tellement communs qu’on assiste à une surenchère de moyens pour attirer l’attention du spectateur.
Aujourd’hui comme aux débuts du cinéma, ces numéros dansés constituent un élément essentiel de la promotion des films. Les chansons qu’ils présentent ont également un impact économique majeur pour l’industrie de la musique car elle dépend toujours à environ 70% du cinéma.
Bipasha Basu était un mannequin à succès lorsqu’elle joue dans son premier film, Ajnabee, à l’affiche en 2001. À 22 ans, elle y gagne un Filmfare Award de meilleure débutante et une notoriété d’actrice de nature à faire oublier une publicité controversée avec Dino Morea, son petit ami de l’époque. C’est avec lui qu’elle commence dans Raaz l’année suivante une série de petits film d’« horreur » dont elle émaillera sa carrière. Puis elle se sépare de Dino et se fait regonfler un peu (3 pouces), avant d’entamer Jism et une relation avec John Abraham. Le film comme sa nouvelle liaison font beaucoup de bruit dans le petit monde de Bollywood.
Mais pour être une actrice reconnue, il faut jouer dans de vrais films. À coté de sa participation à des comédies romantiques peu convaincantes et aux productions de la Bhatt factory dont elle est une vedette récurrente, elle s’essaye donc aussi à des œuvres plus sérieuses. Elle est ainsi d’Apaharan en 2004 et de Corporate en 2006. Cette même année, elle participe à Omkara de Vishal Bhardwaj. Elle incarne un petit rôle dans cette formidable re-création indienne d’Othello. Surtout elle y est la nautch-girl qui chante et danse Beedi pour la bande d’Omkara (Ajay Devgan) dont fait partie son mari Keshav (Vivek Oberoi).
Vishal Bhardwaj en a composé la musique rustique et terriblement entraînante. Sunidhi Chauhan est la voix de Billo (Bipasha Basu) tandis que Sukhwinder Singh, Nachiketa Chakraborty et Clinton Cerejo sont celles des hommes. Les paroles à double sens ont été écrites par Gulzar.
Un Beedi est une cigarette indienne comparable à un cigarillo. La chanteuse incite un homme à l’allumer à la chaleur de son cœur. Cette invitation pourrait paraître étrange, jusqu’à ce qu’on réalise que les mots parlent en réalité de foie et non de cœur ; elle parle ici de la chaleur qui vient de l’intérieur du corps. Si l’on imagine que les feuilles de tabac roulées serrées sont un symbole phallique, il n’est dès lors pas surprenant que la chanteuse prétende avoir oublié les paroles de la chanson.
Après quelques multi-starrer à succès tels que Race ou All the Best : Fun Begins, Bipasha Basu retourne à des films plus modestes qui rencontrent un public réduit. On l’a vu ainsi dernièrement dans les médiocres Creature 3D et Alone. Sa méthode de fitness en DVD se vend peut-être même plus que ceux de ses films récents…
Shah Rukh Khan avait déjà réalisé quelques item-numbers avant Om Shanti Om sorti sur les écrans en 2007. On l’avait ainsi vu dans Shakti : The Power avec Aishwarya Rai ou Kaal avec Malaika Arora. Dans ces deux exemples, chorégraphiés par Farah Khan, le coté « sexy » était porté par la femme sublime qui l’accompagnait et non par Shah Rukh lui-même.
Lorsqu’elle réalise son second film, Farah Khan prend le public à contre-pied en chosifiant comme jamais sa star masculine. Elle applique toutes les règles d’un item-number olé-olé, si ce n’est que cette fois, le personnage central est un homme. Shah Ruk Khan s’est musclé et épilé à la cire comme pour répondre aux canons de la mode vanté par les magazines féminins. Salman Khan s’était fait une spécialité de tomber la chemise sur un torse imberbe. Comme un pied de nez à son vieux collègue, Shah Rukh présente un physique parfaitement travaillé, là où Salman a toujours été un peu balourd. Le public, surpris, ouvrira de grands yeux dès les premières secondes de Dard-e-Disco.
Le duo Vishal-Shekhar a composé la musique sur laquelle Javed Akhtar a posé des paroles utilitaires. Sukhwinder Singh prète sa voix à Shah Rukh tandis que Caralisa Monteiro et Nisha Marianne font les cœurs féminins. Car la chanson ne présente pas qu’un homme. Il est entouré de femmes toutes plus belles les unes que les autres. Et pour être sûres de ne pas faire de l’ombre au monsieur, elle affectent une étonnante mine renfrognée.
Le titre est dérivé d’expressions persanes telles que « Dard-e-Dil » (la douleur du cœur) où on aurait remplacé le cœur (« Dil ») par « Disco ». Il fallait bien rimer avec « Disco », mais il y a peu de mots hindi en « ko ». C’est pourquoi, certains ont trouvé que les paroles étaient parfois incohérentes. Mais quelle importance ?
On ne sait pas bien quand Gauhar Khan est née. Il semble que ce soit vers 1983, à Pune dans une famille musulmane. Ses jeunes années ne sont pas plus connues. À 18 ans, elle a participé à des concours de reines de beauté tout en entamant une carrière de mannequin. On l’a ainsi vue dans des publicités, des défilés de mode, des clips vidéo ; enfin tout ce que font les modèles. On la retrouve dans deux item-numbers en 2004, mais elle ne s’oriente réellement vers le cinéma qu’en 2009 dans Rocket Singh où elle joue de façon plutôt convaincante.
L’année suivante, elle danse Parda Parda dans Once Upon a Time in Mumbaai. Shoaib (Emraan Hashmi) y traque et tue un traître à l’organisation de Sultan (Ajay Devgan) entre deux soirées dans un cabaret. La merveilleuse Rehana (Kangana Ranaut) finit par s’effondrer à la suite d’un malaise cardiaque sans rapport avec les affaires de la mafia.
Ce fantastique item-number recrée l’univers des chansons de cabaret du début des années 1970. Les arrangements de Pritam reprennent les mélodies et le style d’R.D. Burman, en particuler Duniya Mein Logon Ko tiré d’Apna Desh et Piya Tu Ab To Aaja de Caravan. Sunidhi Chauhan chante les paroles d’Irshad Kamil, tout comme Asha Bhosle interprétait celles d’Anand Bakshi ou de Majrooh Sultanpuri. Et c’est à Helen que l’on pense en voyant Gauhar Khan.
Après cette réussite, Gauhar sera encore de deux films : Game en 2011 et Ishaqzaade en 2012. Elle est appréciée du public comme de la critique. Pourtant, le rythme de ses tournages reste très faible. À bientôt 30 ans, sa filmographie est aussi modeste que les propositions qu’on lui fait. Elle décide donc de se renouveler dans… la télé-réalité. Elle rentre dans la maison de Big Boss lors de la 7e saison et remporte l’épreuve. Puis elle se fait peur dans le Fear Factor indien dont elle est rapidement éliminée.
Même la télévision montre ses limites. Gauhar Khan tente aujourd’hui de démarrer une nouvelle carrière dans le cinéma penjabi. On ne sait jamais, mais à près de 35 ans, cela risque d’être compliqué…
Nargis Fakhri est née en 1979 à New-York d’un père pakistanais et d’une mère tchèque. Ses parents divorcent lorsqu’elle est enfant puis son père décède. Cette jeune américaine qui ne connait rien du sous-continent fait ses études dans le New-Jersey et se lance avec succès dans le mannequinat à l’âge de 16 ans. On ne sait trop comment Imtiaz Ali la repère, mais il l’invite en Inde et la lance dans Rockstar qui sort en 2011.
Bien sûr, elle ne parle pas un mot d’hindi. Elle récite donc ses dialogues en phonétique sans rien y comprendre. Mona Ghosh Shetty qui avait doublé avant elle d’autres artistes telles que Deepika Padukone dans Om Shanti Om, Rani Mukherjee dans Ghulam ou Katrina Kaif dans Sarkar est sa voix. Nargis interprète le rôle d’une anglaise dans son film suivant, Madras Café. Son accent américain surprend, mais au moins elle comprend son texte. Enfin, dans Main Tera Hero elle se post-synchronise elle-même en hindi pour la première fois.
Nargis est avant-tout un mannequin, elle ne révolutionne donc pas l’art du jeu. Elle ne sait pas danser non plus, ce qui devrait lui fermer les portes des chansons à Bollywood. Mais elle a un avantage imparable : une plastique à tomber par terre. Elle se retrouve donc en 2014 au cotés de Salman Khan dans Yaar Naa Miley tiré de Kick. Il s’agit d’un item-number sans aucun rapport avec l’histoire du film. Il pourrait même être coupé sans que les spectateurs s’en rendent compte.
Ce serait dommage car ils manqueraient la musique de Yo Yo Honey Singh sur laquelle Yo Yo Honey Singh et Jasmine Sandlas chantent leurs propres paroles. Les Indiens qui l’ont vu en salle à la sortie n’ont pas su qu’ils rataient le second couplet de Sallu. Les Français au même moment, pouvaient voir la chanson en entier. Les raisons de cette coupe sont d’autant plus mystérieuses que Yaar Naa Miley s’est retrouvée en intégralité lors de la diffusion TV et sur les DVD vendus en Inde. Peut-être les censeurs ont-ils été trop sensibles à la bouche de Nargis qui susurre à son Diable qu’elle est prête à mourir par amour….
Deepika Padukone était un jeune mannequin de 19 ans qui rêvait de devenir actrice. Après quelques publicités, calendriers et défilés de mode, elle accepte en 2005, un peu à contre-cœur de participer à un clip vidéo d’Himesh Reshammiya. Bien lui en pris car elle est repérée par la chorégraphe-réalisatrice Farah Khan qui prépare son second film. Ce devait être Happy New Year mais le projet est repoussé et ce sera Om Shanti Om.
Elle est extrêmement jolie mais encore un peu gauche. Qu’à cela ne tienne, Farah Khan la prend sous son aile et la guide pour son premier rôle à Bollywood. Le succès est considérable. Elle gravit dès lors les échelons à très grande vitesse. Love Aaj Kal, Cocktail, Yeh Jawaani Hai Deewani, Chennai Express, Ram-Leela, autant de grandes réussites populaires qui font d’elle en quelques années une actrice incontournable.
Happy New Year sort enfin en 2014. Deepika avait déjà réalisé des item-numbers, mais Farah Khan lui prépare quelque-chose de spécial pour la présenter dans le film. Dr. Zeus compose la musique de Lovely, Kumaar et Jiwan Mann écrivent les paroles tandis que Kanika Kapoor, Ravindra Upadhyay, Miraya Varma et Fateh sont les voix. La chorégraphie est de Geeta Kapoor, l’éternelle assistante de Farah Khan. Mais comme pour Sheila Ki Jawani en 2010, elles se sont en réalité mises à deux : Farah à la caméra et Geeta à la danse.
Charlie (Shahrukh Khan) et sa bande sont à la recherche d’un professeur de danse pour les entraîner en vue du concours international qui s’annonce. Quelle meilleure idée qu’une danseuse ? Charlie, Nandu (Abhishek Bachchan) et Rohan (Vivaan Shah) vont donc assister à la prestation de Mohini (Deepika Padukone) pour voir si elle pourrait faire l’affaire…
Son numéro reprend tous les canons du genre en les magnifiant. On retrouve donc la foule de spectateurs surexcités, le décor grandiose, la chanson entêtante à souhait, les danseuses choristes à damner les saints et une item-girl à couper le souffle. Elle a le même nom que celle d’Ek Do Teen, est-ce une surprise ?